Le mafieux Christopher Coke arrêté à Kingston
Christopher "Dudus" Coke. © Reuters
La police jamaïcaine a annoncé l'arrestation de Christopher "Dudus" Coke, accusé d'être un baron de la drogue mais considéré par les habitants de Kingston comme un "Robin des Bois".
Le baron présumé de la drogue, le jamaïcain Christopher Coke,
surnommé "Dudus", dont les Etats-Unis réclament l'extradition afin de le
juger pour trafic de drogue, a été arrêté mardi 22 juin sur l'île
caribéenne. Sa traque avait provoqué de violents affrontements fin mai à
Kingston entre police et armée d'un côté, et affidés de "Dudus" de
l'autre, qui avaient fait au moins 73 morts civils, obligeant le
gouvernement à proclamer l'état d'urgence. "Les forces de police
souhaitent confirmer l'information selon laquelle Christopher Lloyd
Coke, qui était sous le coup d'un mandat d'arrêt pour être extradé, a
été arrêté dans l'après-midi", a déclaré en soirée le chef de la police
de Kingston, le commissaire Owen Ellington. Depuis des semaines, le
gouvernement du Premier ministre Bruce Golding cherchait à mettre la
main sur "Dudus" pour l'extrader vers les Etats-Unis.
A la tête du principal gang de trafiquants de drogue de Jamaïque, les
"Shower Posse",
Coke est considéré comme un marchand de mort
ultra-violent par Washington, mais aussi comme un bienfaiteur et un
"parrain" dans les bidonvilles de Kingston, réputée l'une des capitales
les plus violentes du monde. Fils de Jim Brown, autre "parrain"
légendaire de l'île, disparu tragiquement en 1992, Coke, qui avait un
mode de vie plutôt discret, a bâti un empire avec son gang en jouant
aussi de la politique et des affaires. Le Premier ministre Bruce Golding
est lui-même député de Tivoli Gardens, le fief du Shower Posse qui
apportait son soutien au parti au pouvoir, le Jamaica Labour Party.
Crack, cocaïne et marijuana
La justice américaine accuse Coke d'approvisionner New York et les
autres villes de la côte Est en crack, cocaïne et marijuana, causant au
passage de sanglantes guerres de gangs. Les enquêteurs en évaluent le
bilan à plusieurs milliers de morts depuis les années 90. Coke risque la
prison à vie s'il est extradé et reconnu coupable aux Etats-Unis. Le
révérend jamaïcain Al Miller a annoncé en soirée mardi que "Dudus" avait
été arrêté dans la journée, précisant qu'il avait lui-même "aidé au
processus de remise (à la justice) de Coke". L'ecclésiastique avait déjà
participé aux négociations qui ont permis un relatif apaisement à
Kingston.
L'annonce du mandat d'arrêt contre Coke avait déclenché de véritables
combats de rue durant près d'une semaine à Kingston, affectant durement
l'image de paradis touristique de l'île caraïbe, où les estivants ne
s'attardent guère dans la capitale. Soutenus par des unités de l'armée,
la police de Kingston avait donné l'assaut à "son" quartier, le
bidonville de Tivoli Gardens, rencontrant une vive résistance des hommes
de main de "Dudus". Coke était parvenu à s'échapper, mais 73 personnes
avaient trouvé la mort dans les échanges de tirs.
"J'appelle les familles, les amis et les symphatisants de Christopher
Coke à garder leur calme et à laisser la loi s'appliquer", a déclaré le
commissaire Ellington. "Nous tenons aussi à réassurer au pays que nous
poursuivrons nos efforts pour vaincre le crime organisé et rétablir la
loi dans ce pays", a ajouté le chef de la police, qui s'était juré
d'arrêter le chef de gang. L'offensive du gouvernement contre Coke,
après des mois d'hésitation, a suscité l'espoir en Jamaïque d'une
rupture des liens entre les gangs et les hommes politiques.